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6 mai 2008 2 06 /05 /mai /2008 07:06

Sculpteur, peintre, poète et écrivain, Gust Gils, également  compositeur, parolier, auteur dramatique et traducteur, voit le jour à Anvers le 20 août 1924 et meurt à Essen le 11 novembre 2002. Son premier recueil de poèmes Partituur voor vlinderbloemigen (Partiture pour papilionacées) paraît en 1953.

Co-fondateur et collaborateur de la revue littéraire d’avant-garde Het Cahier (Le Cahier), il participe également avec les poètes Hugues C. Pernath et Paul Snoek et le dramaturge Tone Brulin à la création de la revue expérimentale Gard Sivik, organe de la génération dite « de 55 ». Il quitte cependant la rédaction quand la revue s’engage dans une poétique par trop tributaire du « nouveau réalisme ». Outsider, il ne fera plus partie d’aucun groupe.

Privilégiant le rythme plutôt que l’harmonie, il explore systématiquement dans ses expérimentations « verbosoniques » la zone d’ombre entre poésie et musique. Il collabore avec l’I.P.E.M. (Instituut voor Psychoacustica en Elektronische Muziek, Institut de Psychoacoustique et de Musique Électronique) à l’université de Gand.

Adepte d’une prose particulière qu’il baptise « paraprose », il précise que le préfixe « para » implique tout aussi bien la parabole, le paranormal et la paranoïa. Précurseur de la poésie de podium et du slam, bête de scène, il pratique avec bonheur l’art de la performance.

Vive, rapide et assassine, la poésie de Gust Gils oppose un bon sens désarmant à la folie d’une société dont il dénonce allègrement les valeurs tout autant momifiées que mortifères. À moins que cette poésie ne confronte le solide bon sens du Flamand – l’homme-redigonte, disait Van Ostaijen – à la joyeuse salubrité de l’absurde. C’est que Gils participe à la fois, et tout naturellement, d’un solide réalisme corrosif et d’un indécrottable terrorisme idéaliste. L’homme précaire, menacé par la technique,  est au centre de ses « paraproses », courts récits dans la tradition des grotesques allemands et de Van Ostaijen, dont il est, sur ce point et avec Marcel Wauters, le seul continuateur.

Ce n’est pas par hasard que Gils et Freddy de Vree, alors qu’ils dirigent l’Institut de Pogo$ophie, traduisent Le Cardinal Pölätüo de Stefan Thermerson. C’est chez ce dernier que Gust Gils rencontre Henri Chopin en 1967. Gils n’est pas resté insensible à l’évolution des « poèmes ouverts ». Dans son ouvrage de référence, Poésie sonore internationale, Chopin souligne que Gils  utilise sa voix, « mais on ignore la manière dont il procède ». Il était effectivement très secret.  

« J’utilise exclusivement des sons vocaux sans volonté sémantique », disait-il. Gils voit dans le poème sonore un moyen de briser l’isolement du poète. À la fin des années soixante, il collabore aux fameux festivals Text Sound Composition de Stockholm.

L’œuvre de Gils se présente comme un de ces cabinets de curiosité, voire de ces musées des horreurs, dont l’inventaire ne peut provoquer que trouble et fascination. Auteur prolifique et protéiforme, Gils est nettement plus apprécié aux Pays-Bas qu’en Flandre. Son œuvre sera néanmoins couronnée en 1996 par le Prix triennal de la Communauté flamande.

Sous des allures bourrues et parfois bougonnes, il masque une sensibilité aux abois. Loyal en amitié, fidèle à ses convictions, refusant toute concession, Gils est un modèle de probité littéraire. Il ne fréquente pas les cénacles à la mode et l’esprit de chapelle lui est totalement étranger. Ce timide est trop sensible pour ne pas avoir les gendelettres en sainte horreur, ce solitaire était trop intègre pour faire les courbettes que l’étiquette littéraire impose. Pourquoi lui aurait-il fallu jouer le jeu, alors que le jeu poétique était à sa poigne ?

Quand les idoles du marché seront bien oubliées, l’œuvre de Gils, bloc erratique, dominera de haut un paysage renouvelé.

HFJ

Nous ne te verrons pas, illuminante paix. Poésie et politique, Orion, 1976.

Poésie flamande d’aujourd’hui, Actes Sud, 1986.
Prose flamande d’aujourd’hui, La Longue vue, 1988

Ici on parle flamand & français. Une fameuse collection de poèmes belges, Le Castor Astral, 2005.

&

Paul Buyck, Gust Gils: toujours contemporain, in Septentrion XXIV, 3, 1995, pp. 77-78.

 

 

 

 

 


 

 

 

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