Paul Neuhuys (1897-1984) signale dans son journal la belle thèse de Rik Sauwen sur “L'esprit dada en Belgique”.
Quarante ans plus tard, hier soir, lors d'une réunion amicale à la Fleur en papier doré à Bruxelles, Rik Sauwen évoquait Paul Neuhuys à l'occasion de la parution de la livraison 40-41 du Bulletin de la Fondation Ça ira, axée sur deux évadés de l'oubli, les peintres Marthe Donas et Jules Schmalzigaug.
Les travaux menés ou suscités par la Fondation ça ira ne se limitent pas à l'historiographie de la revue Ça ira! (1920-1923) et à l'étude de l'œuvre poétique et critique de Paul Neuhuys, mais englobent également les réseaux ramifiés du poète et de la revue. La diversité des sujets traités par le bulletin en témoigne largement : de Clément Pansaers, Pascal Pia, Paul van Ostaijen et Roger Avermaete à André Blavier et Henri Chopin, en passant par Paul-Gustave van Hecke et Norine, Paul Joostens, Jean-Jacques Gaillard, Marc. Eemans et Wout Hoeboer – sans oublier Maurice van Essche, le père Joseph de Ça ira!...
Après avoir effleuré quelques souvenirs personnels, Thierry Neuhuys constata un regain d'intérêt pour l'avant-garde historique, comme en témoignent entre autres les travaux académiques et les recherches de Nele Bernheim, d'Ann van Beurden, de Daphné de Marneffe et d'Ann Paenhuysen ainsi que de Pieter Fannes, de Francis Mus et de Matthijs de Ridder.
Colette Nys-Mazure et Christian Libens, auteurs de l'anthologie Piqués de vers ! 300 coups de cœur poétiques, citent en quatrième de couverture 'Art poétique', un poème de Paul Neuhuys datant de 1921. Clôturant la réunion amicale à la Fleur en papier doré, Luc Neuhuys en fit la lecture :
Écoute le son de la pluie dans les gouttières de zinc
Aime les formes brèves et les couleurs vives
Foin des natures mortes et des tableaux vivants
Fous-toi de la rime
Que la tour d'ivoire devienne une maison de verre
et se brise.
Paul Neuhuys et ses deux fils ont bien connu Walter Malgaud, le frère de Jules Schmalzigaug, dont les Musées royaux des beaux-arts de Belgique présente une imposante rétrospective. Valerie Verhack, commissaire de l'exposition assistait à la réunion de Ça ira. Le catalogue comprend deux pénétrantes études de sa main, ainsi que des contributions des éminents spécialistes du futurisme Giovanni Lista et Willard Bohn. Préfaçant le catalogue, Michel Draguet rend hommage à feue mon amie Phil Mertens et à Ronny van de Velde, dont la tenacité fut décisive pour raviver la mémoire de Schmalzigaug.
Le Bulletin ça ira publie les lettres jusqu'ici demeurées inédites de Schmalzigaug à Umberto Boccioni. Cette publication exclusive, commentée et annotée par Maria Elena Versari et autorisée par le Getty Research Institute, illustre non seulement l'évolution artistique du peintre, mais également la problématique du nationalisme et de l'internationalisme, tension présente dans toutes les avant-gardes historiques.
Deux connaisseurs de l'œuvre de Marthe Donas étaient également des nôtres : Jean-Marie Aendekerk et Peter Pauwels, dont les contributions à la redécouverte de celle qui fut un bref instant l'énigmatique Tour Donas(ky) sont désormais incontournables.
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Ce n'est pas par hasard que cette séance informelle se tint sous le regard goguenard de Gérard Van Bruaene dont la silhouette massive domine symboliquement l'arrière-salle rénovée de la Fleur en papier doré.
En avril 1926, inaugurant La Vierge poupine seconde mouture au 32 de l'avenue Louise, Van Bruaene y présentait une copieuse exposition de Marthe Donas (71 toiles). À cette époque, Paul Neuhuys fréquentait déjà “le petit Gérard”, qui avait organisé des expositions de Paul Joostens et de Floris Jespers, “les deux peintres de Ça ira!”...
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Parmi les participants à cette réunion amicale, signalons entre autres le spécialiste du Roman de Renart René Broens ; le poète Hendrik Carette ; l'acteur et conteur Gaëtan Faïk ; le cinéaste Jean-Noël Gobron ; la romancière Mieke de Loof, auteur de polars historiques situés dans la Vienne de la veille de la première Guerre mondiale ; Robin de Salle, archiviste de la Fondation ça ira ; Marc Tiefenthal, critique d'art et grand blogueur devant l'Éternel ; ainsi que Pruts Lantsoght, saluée par Thierry Neuhuys comme bienfaitrice de la Fondation.
Signalons également quelques amis proches mais géographiquement lointains qui déplorent n'avoir pu assister à notre réunion amicale : le traducteur Daniel Cunin ; Mikael Lugan, spécialiste de Saint-Pol-Roux ; Kees Snoek, professeur en Sorbonne ; et Bastiaan David, Régent de Navigation Épigéenne, Cofondateur de l’Académie Néerlandaise pour la ’Pataphysique.
HFJ