Nicolas Pauvoiseau naquit en 1900
d’une mère wallonne et d’un père flamand
A six ans, cet enfant était si maladroit
qu’en mangeant sa tartine il se mordait les doigts
Sur les bancs de l’école il rencontra Félix
Félix qui de sa brève existence fut l’x
Nicolas se voua dès son jeune âge aux lettres
pensant qu’écrire était sa seule raison d’être
A vingt ans il coucha avec l’une des filles
d’un professeur d’Histoire et de Géographie
Elle était laide mais il la trouvait si belle
qu’il ne l’appelait pas autrement que Cybèle
Les parents s’en étant occupés, leur idylle
se termina par des larmes de crocodile
et tandis qu’il passait ses vacances à La Haye
Nicolas épousa sa cousine Aglaë
Dès qu’il fut en ménage, il comprit que la femme
ne peut suffire à étancher la soif de l’âme
Il partit pour Paris et retrouva Félix
qui de ses cendres renaissait comme un phénix
Ensemble ils rêvaient de leur enfance passée
n’ayant pour dormir qu’une armoire renversée
Félix s’enivrait jusqu’à rouler sous la table
Bref c’était devenu un être insupportable
Un jour il déclara, dédaigneux de Paris
qu’il voulait devenir roi nègre et disparut
Nicolas resta seul. Être ou ne pas être
le froid entrait par les interstices de la fenêtre
Il avait publié un receuil:‘Dernier cri’
que l’on se plut à reconnaître bien écrit
Gloire et amour lui avaient souri un instant...
il se donna à la mort à l’âge de trente ans.
Paul NEUHUYS
(L'Arbre de Noël, Anvers, éditions Lumière, 1927)