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21 mars 2011 1 21 /03 /mars /2011 23:36

 

TantEXLIBRIS.jpg

Ex-libris d'Edgar Tant, gravé par J. Verwest

La Bibliothèque de l'Université de Gand conserve un exemplaire d'une plaquette de vingt et une pages tirée à soixante exemplaires numérotés, intitulée LES DERNIERS OUVRAGES / d'EDGAR TANT / par cinq auteurs différents (1946). Alléché par le titre quelque peu énigmatique de cet opuscule, et dans l'espoir d'y trouver enfin de plus amples informations sur ce personnage effacé, je m'étais résolu à faire le déplacement vers la citée comtale. L'acteur et metteur en scène Dries Vanhegen m'a heureusement épargné cette démarche (voir le blogue du 11 mars).

Non mise en librairie mais témoignant de la naïveté mâtinée de vanité d'un écrivain aux espoirs frustrés, cette brochure reproduit huit lettres adressées à Edgar Tant en remerciement de l'envoi de ses derniers ouvrages, à savoir: Sérénité(1945, cf.le blogue du 11 mars) et Un grand poète : Iwan Gilkin(1945).

La table des matières souligne à souhait les éminentes qualités des cinq épistoliers: Victor Rousseau, statuaire, membre de l'Académie royale de Belgique; Charles Desbonnets, poète, auteur dramatique, critique littéraire et dramatique, membre de l'Association des Écrivains de belges; Georges Soyer, romancier, essayiste, critique littéraire, membre de l'Association des Écrivains belges; Adèle Durieux, poète, auteur dramatique, romancière et Alex Pasquier, romancier, critique littéraire, essayiste, Secrétaire Général de l'Association des Écrivains belges; toute qualités étalées avec respect et force majuscules par Tant, architecte de cet opuscule...

Enrobées de formules de politesse, ces missives ne nous apprennent pas grand chose – si ce n'est sur le modeste réseau d'Edgar Tant.

Victor Rousseau remercie l'auteur

pour l'envoi de [la] plaquette Sérénité, si élégamment présentée, où s'inscrivent quelques courts poèmes, substantiels d'un sentiment apaisé, d'une philosophie qui fait belle la part du Poète, loin de la vie agitée des cités bruyantes.

La Poésie ne peut surgir d'ailleurs qu'à ce renoncement. Elle conduit à la noble simplicité, disant par un cri, une détresse ou une grande joie, l'essentiel de l'inspiration du Poète, dont le soufffrance se mue en Sérénité.

Le 13 mai 1945, Charles Desbonnets remercie Tant de son 'petit dernier'.

Vous êtes demeuré calme et serein au cours de cette grande tourmente, vous avez pu écrire ces jolis vers que vous venez de publier, en un moment où l'édition s'avère quasi impossible. Bravo, bravo, mon cher Poète. La lecture de Sérénité, n'a fait naître qu'un regret en moi, c'est qu'elle fut trop brève... J'ajoute tout de suite qu'en l'occurence, ce n'est que la qualité qui importe. Bien de gros recueils ne m'ont pas donné le vlf plaisir que m'a procuré le votre (sic).

Georges Soyer cite les poèmes de Tant dans une lettre dont je parlerai peut-être dans une prochaine édition.

Je n'arrive pas à mettre la main sur l'essai de Tant consacré à Iwan Gilkin, un in-duodecimo de cinquante-cinq page imprimé sur les presses de Louis Vanmelle à Gand. Victor Rousseau, qui a très bien connu Iwan Gilkin, estime qu'Edgar Tant a fait œuvre pie en remettant cet homme 'charmant et simple' à l'honneur.

C'est vrai, on se demande pourquoi un tel écrivain est resté jusqu'ici dans l'ombre. Ce cas n'est pas rare, c'est même, je pense, le signe avant-coureur d'un futur réveil. De très grands écrivains en France, n'ont-ils pas mis plusieurs générations à sortir de l'oubli ?

Georges Soyer attendait, 'non sans appréhensions', l'étude sur Iwan Gilkin annonçée par Tant – 'le sujet est difficile et complexe'. Après avoir passé deux soirées à lire attentivement l'analyse 'serrée et subtile' de Tant, il constate toutefois que le Gantois témoigne 'd'une compréhension entière de ce paradoxal et presque génial littérateur et poète que fut notre Iwan Gilkin'.

Et cette nouvelle manifestation de votre activité littéraire nous découvre un aspect fort séduisant de votre œuvre : l'analyse impartiale et intelligente, fine et éclairée.

Il est piquant aussi de voir un poète de Sérénité, vivant dans la paix bienfaisante de cet oasis d'intellectualité qui est Laethem-Saint-Martin, analyser si parfaitement le grand inquiet que fut notre Gilkin.

Soyer saisit surtout l'occasion pour développer sa propre vision sur 'la personnalité littéraire et exceptionnelle de Gilkin.

Adèle Durieux-Gillet constate que la prose de Tant 'enchâsse avec infiniment de précision et de charme' les vers d'Iwan Gilkin.

Quant à Alex Pasquier, il se fend de la traditionnelle lettre de circonstance :

Mon Cher Confrère,

Votre élégante et compréhensive étude sur Iwan Gilkin m'a causé une grande joie. Je vous en remercie vivement. C'est un document très complet et de première valeur, qui me sera utile, je n'en doute pas.

Toutes mes félicitations et vœux de bonne santé.

*

Quelle ne fut pas ma déception ! Ces huit lettres m'en apprennent plus sur les scripteurs que sur le destinataire, si ce n'est que ce dernier y attachait assez d'importance pour les publier à ses dépens...

*

Complétons déjà la bibliographie de Tant par deux publications que je n'ai pas encore consultées:

L'année poétique belge. Préface de Madame la Comtesse de Noailles. Trois sonnets d'Edgar Tant, précédés d'une notice bio-bibliographique, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1924.

Quelqiues remèdes populaires tirés des simples. Folklore médical (Gand, Louis van Melle, s.d.)

Entre temps se dessinent de nouvelles pistes de recherche...

Henri-Floris JESPERS

(à suivre)

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