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25 juin 2008 3 25 /06 /juin /2008 05:46

La philosophie pacifiste et anarchiste individualiste de Henri Ner (1861-1938) s’exprime dans le roman Le crime d’obéir — titre programmatique s’il en est —, le premier texte qu’il signe d’un pseudonyme quasi anagrammatique qui le rendra célèbre dans les milieux anarchistes et libertaires : Han Ryner.[1]

Ce roman contient en quelques phrases le noyau même de sa philosophie :

Comme tous ceux qui prétendent commander, il obéit. Nous n’imposons que des volontés qui nous furent imposées. L’orgueil d’être Colonel se paie de l’humiliation de subir le Général. Toute autorité est chose chancelante, essaie de s’appuyer à une autorité qui lui semble plus solide.

Conférencier et orateur de talent, Han Ryner participe à partir de 1903 au mouvement des « Universités populaires ». Il fut élu en 1912 Prince des conteurs sous l’impulsion de J.-H. Rosny aîné et par les lecteurs de L’Intransigeant. À une époque, cette distinction était en vogue : il y eut un Prince des poètes (Paul Fort), un Prince de l’épouvante (André de Lorde), un Prince des humoristes (Gabriel de Lautrec) et un Prince des gastronomes (Curnonsky).

Durant la première guerre mondiale, il exprimera avec ténacité son universalisme pacifiste et antimilitariste dans un grand nombre de petites revues politico-littéraires.

&

De septembre 1920 à février 1921, Han Ryner publie dans Ça ira des articles et notes de lecture sur Pierre Jean Jouve, Banville d’Hostel et Florian Parmentier.[2]

De plus, les archives des Amis de Han Ryner conservent le manuscrit d’une note consacrée à  Réformisme ou Révolution de Charles Plisnier, « sans doute destinée à Ça ira » :

 Cette brochure ne donne pas les raisons d’être socialiste. Elle donne les raisons d’être révolutionnaire » Ces raisons telles que les expose M. Plisnier, me paraîtraient, si j’étais bourgeois, singulièrement fortes et embarrassantes ; mais, si j’étais socialiste, ah ! comme elles me sembleraient faciles et bourgeoises !

Révolutionnaires de sang et bourgeois bellicistes : vous êtes les mêmes.

La plaquette de Plisnier parut en janvier ou au début de février 1921, peu avant la création du Parti communiste belge, avec une importante préface par Charles Rappoport, vieux routier russe de la gauche. [3]

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Ça ira signale la collaboration de Ryner à Notre Voix et à La Revue de l’époque, ainsi que la « superbe étude » de Pierre Larivière consacré à Ryner dans le numéro du 1er mars 1920 de L’Art libre (Bruxelles).

Maurice Van Essche signe une note enthousiaste sur Les Apparitions d’Ahasvérus :

C’est toujours avec un intérêt renouvelé que nous voyons apparaître un nouveau livre d’Han Ryner. Par la profondeur de sa pensée et aussi par la richesse inépuisable de son cœur ce philosophe est un des écrivains les plus grands de notre époque. Il ne fut pas grandi par les événements, ni par la poussée des cénacles. [...] La masse l’ignore, mais il n’est pas un esprit éclairé qui ne le connaisse et qui ne se soit retrempé à sa sérénité, à sa foi, qu’il a su maintenir intactes au-dessus de la fange des temps présents.[4]

Quant à Willy Koninckx, présentant Le Père Diogène, il se plaît à souligner la clairvoyance et la franchise de Ryner.[5]

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Les éditions Ça ira publieront une conférence de Han Ryner, Les Artisans de l’avenir.[6] La correspondance de Maurice Van Essche (13 lettres) et Han Ryner (11 lettres), conservée au Archief en Museum voor het Vlaamse Cultuurleven (AMVC) à Anvers, s’échelonne du 2 juillet 1920 au 25 décembre 1921.

L’imprimeur de Ça ira ne semble pas avoir été particulièrement diligent, car le 14 août 1921, Van Essche s’excuse auprès de Pierre Larivière (né aux environs de 1884 - 25 février 1932), le dessinateur du frontispice, :

 ... vraiment confus du retard apporté par notre imprimeur à l’impression de la brochure de notre grand ami Han Ryner. Nous venons cependant de corriger les premières épreuves. Nous recevrons la seconde jeudi ou vendredi (après les fêtes anversoises) et l’enverrons immédiatement à notre ami pour qu’à son tour il puisse les vérifier. La parution de la plaquette ne tardera donc guère

 

Les Artisans de l’avenir paraît enfin début octobre 1921. Le prix de vente de la plaquette était fixé à 1,75 F ; les frais d’impression pour 1150 exemplaires s’élevaient à 553 F ; pour les éditions Ça Ira c’était un fort tirage, mais il s’agissait d’une co-édition avec Les Amis de Han Ryner.

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Tout comme Barbusse, Rolland, Bazalgette, Edmond Picard et Xavier Privat, Han Ryner adresse un message aux organisateurs de la manifestation « démocratique et artistique » en hommage à Georges Eekhoud au Théâtre lyrique à Schaerbeeck, le 27 mars 1920. Willy Koninckx signalera cette « importante manifestation » dans Ça ira.

Du 17 au 20 avril 1922 se tient à Bruxelles un « Congrès Interstellaire » organisé par Pierre Bourgeois, manifestation rassemblant des « intellectuels indépendants dans un esprit de vaste fraternisation ». Han Ryner y donne une conférence.

Henri-Floris JESPERS



[1] Han RYNER, Le crime d’obéir. Roman d’histoire contemporaine, Paris, La Plume, 1900 ; réédition : Conflans, éditions de l’Idée libre, 1925, 254 p.

[2] « Un livre à aimer », no 6, septembre 1920, pp. 147-149 ; « Banville d’Hostel », no 9, décembre 1920, pp. 193-199 ; « P. J. Jouve : Romain Rolland vivant », no 10, janvier 1921, pp. 222-223 ; « Florian Parmentier : L’Ouragan », no 11, février 1921, pp. 238-240.

[3] Cf. Henri-Floris JESPERS,  Maurice Van Essche : Dossier provisoire (II), in Bulletin de la Fondation Ça ira, no 24, 4ème trimestre 2005, pp. 3-8.

[4] Maurice VAN ESSCHE, Notules, in Ça ira, no 7, octobre 1920, pp. 171-172.

[5] Willy KONINCKX, Notules, in Ça ira, no 9, décembre 1920, p. 207.

[6] Les Artisans de l’avenir: conférence prononcée à Paris, le 27 février, Salle Procope pour la première matinée de la guilde Les Artisans de l’avenir. — Paris, Amis de Han Ryner ; Eeckeren-Anvers, Ça ira, 1921, 42 p. Frontispice : Pierre Larivière.

 

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